
Modèle abouti :
Afin de fêter les 40 ans de la marque, Ferrari sort un modèle d’exception entièrement dédié à la performance, sans concession au confort, une sorte de voiture de compétition client clé en main.
Le projet est confié à Nicola Materazzi, entré en 1979 au service course de Ferrari en tant que chef du bureau d’études, recruté directement par Enzo Ferrari. Il fait ses armes aussi bien sur les F1 que les véhicules routiers, utilisant son expérience sur les turbos sur tous les produits signés du cheval cabré.
Il a été mis au défi par Enzo de fabriquer un v8 turbo de 400 ch avec une utilisation programmée pour débuter une carrière en championnat des rallyes en groupe B dans la catégorie des 4,0l, ou 2,8l avec turbo. Ce projet aboutit sous la forme de la Ferrari 288 GTO mais elle ne sera jamais engagée en compétition. Elle finit par servir de prototype à celle qui célèbrera les 40 ans de la marque mais aussi redonner du prestige à la firme dont les ventes s’essoufflent un peu d’un côté et donc les résultats en F1 ne sont plus aussi brillants de l’autre côté.
Le projet 164 sera entièrement supervisé par Materazzi et se veut être une voiture de l’extrême sportivité. Les Ferrari de route sont contrées par des modèles 2 fois moins chers qui se permettent même d’être plus puissantes et plus efficaces avec par exemple la sortie de la BMW M3.
La marque au cheval cabré veut démontrer qu’elle n’est pas une firme du passé et bien au contraire reconquérir sa place dans le monde de la sportivité automobile.
Pour le nom, Ferrari sort de ses habitudes car elle ne souhaite pas nommer ce nouveau modèle 308 GTO (30 comme la cylindrée et 8 pour le nombre de cylindres) même si le sigle GTO reste encore évocateur. Une nouvelle nomenclature est créée pour cette occasion spéciale et elle baptise la Ferrari du 40ème anniversaire simplement du nom de F40.

Technologie de pointe et aboutissement d’un projet datant de 1982 :
Le projet a connu une gestation très courte de seulement 13 mois à la demande d’Enzo Ferrari, dès le 10 Juin 1986, qui a donné les moyens de réaliser la F40 en un temps record. Malgré tout, la F40 est développée en dehors des heures de travail habituelles à l’usine afin de ne pas perturber la production de tous les jours.
L’idée est de produire une super 288 GTO qui serait intouchable en compétition sur circuit, vendables aux clients les plus fortunés mais aussi engagés en compétition par la marque elle-même.
Dans ce but Ferrari commence à extrapoler une super 288 GTO à partir de l’Evoluzione, elle-même une version plus aboutie. L’arrêt du groupe B en 1986 par la FIA met fin brutalement à la rentabilité de la 288 GTO qui a déjà une petite production impossible à inscrire en compétition.




Le projet qui devait aboutir à une groupe B se transforme en super sportive des circuits homologuée pour la route. Le moteur de la 288 GTO Evoluzione est repris avec une nouvelle cylindrée à 2936 cc (82x69,5) qui s’explique par la non nécessité de respecter une quelconque homologation dans un championnat. A l’origine, la cylindrée était la même que sur la 288 GTO mais après quelques tests il a été décidé d’en tirer plus de puissance.
Il s’agit toujours d’un v8 à 90° 32 soupapes en position longitudinal suralimenté par 2 turbos IHI. Les IHI ont été préférés aux KKK après un test effectué devant Enzo Ferrari lui-même. Chaque cylindre reçoit 2 injecteurs. Le bloc moteur et la culasse sont en silumin, un alliage d’aluminium et silicium. Les parois internes des chemises en aluminium sont renforcées par dépôt électrolytique d'une couche de nikasil (alliage de nickel-carbure de silicium) pour réduire les coefficients de friction et améliorer la lubrification ainsi que la résistance aux hautes températures.

La puissance passe à 478 ch et la vitesse maxi à 324 km/h. Le 0 à 100 est avalé en 3,9s avec un 1000m départ arrêté en seulement 21,8s.
La boite de vitesse est manuelle à 5 rapports associée à un embrayage à double disque à sec monté aussi longitudinalement. La boite est fournie par Ferrari au lieu de ZF, fournisseur habituel, car aucun modèle ne supportait un couple de 577 Nm.
Il a été demandé à Pirelli de développé de nouveaux pneus pour supporter la puissance et le couple de la F40. Le résultat est le P-zéro et sa carcasse avec des matériaux légers dont du kevlar qui s’inspire directement de l’expérience acquise en F1.

Le châssis est composé, comme sur la 288 GTO, d’un cadre tubulaire en acier. Les suspensions avant et arrière sont indépendantes à bras transversaux avec ressorts hélicoïdaux et barres stabilisatrices. Grâce aux amortisseurs oléopneumatiques réglables depuis l'habitacle, ils peuvent être réglés selon trois niveaux différents de hauteur et de rigidité, en fonction du style de conduite ou des conditions d'utilisation. Un correcteur d’assiette réglable sur 3 positions commandable depuis l’habitacle permet de rehausser la garde au sol de 25 mm.La suspension avant est à double triangulation, issue directement de la 288 GTO Evoluzione. La F40 est équipée de 2 barres antiroulis.
Le freinage est à double circuit séparé avec flexible de type F1 pour activer des disques ventilés de 330 mm provenant de chez Brembo via des étriers à 4 pistons.

Le dessin est bien entendu en provenance de chez Pininfarina (qui gère aussi l’assemblage). La F40 reprend de nombreux traits provenant de la 288 GTO Evoluzione comme le grand couvercle moteur d’un seul tenant.
A voir la F40, on croirait un véhicule déjà préparé et allégé, prêt à courir sur piste. Les panneaux de l’habitacle sont renforcés avec du kevlar. Les réservoirs de carburants sont en résines aéronautiques. La carrosserie est totalement en fibre pour un poids de 46 kg seulement. Une porte ne pèse que 1,5 kg. Le poids total est de seulement 1088 kg à sec. Toute la partie arrière est d’un seul bloc, ailes et capot moteur avec une vitre en plexiglas qui permet une vue sur mécanique. Les vitres sont en polycarbonate avec une ouverture par une simple trappe.
La F40 mesure 4,430m de long pour 1,980ml de largeur sur une hauteur de 1,130m. L’empattement est de 2,450m.



En ce qui concerne l’intérieur, la préoccupation n’a pas été une escalade au luxe, bien au contraire. Les portes se ferment depuis l’intérieur par une simple lanière et s’ouvrent en tirant sur un câble tendu à travers une fente. Tout est spartiate, fonctionnel, le design n’a pas de place ici car tout est pensé pour le poids et la course. Les sièges baquets (tous recouverts d’un tissu rouge) sont en kevlar et il n’y a pas de ceintures de sécurité de série mais des harnais à 4 points.
Seule concession au luxe, la climatisation est disponible mais en option. En série, il n’y a ni radio, ni boite à gant, ni tapis ou garniture en cuir.


Pour être au plus près d’un poids minime et être radicale à souhait, la F40 n’embarque pas d’ABS ou même de direction assistée. Cette approche minimaliste la distingue clairement de sa concurrente, la Porsche 959, qui propose une large utilisation des dernières technologies électroniques.
Une carrière plus longue que prévue :
La F40 est présentée à la presse le 21 juillet 1987 sur le circuit de Fiorano par Enzo Ferrari lui-même puis au public durant le salon de Francfort fin 1987.
La concurrence au fil des ans se nomme Porsche 959, Lamborghini Diablo, Jaguar XJ220 ou encore Bugatti EB110 qui lui prendra le titre de voiture de série la plus rapide. Seule la Porsche est commercialisée au moment de la présentation de la F40. La firme allemande a aussi fait le pari du groupe B avec la 959 et a misé gros sur la technologie alors que la Ferrari voue toute cette conception à la performance pure. Les 2 autos rivalisent en performances mais avec des philosophies totalement opposées.
La mort d’Enzo Ferrari le 14 aout 1987 fera de la F40 la dernière Ferrari présentée par le Commendatore entrainant une spéculation sans précédent, sans même tenir compte de l’exclusivité de ce modèle. On trouvera des modèles à vendre à plus de 5 millions de francs alors que le prix neuf était de 1,719 million à sa sortie. On estime que seulement 10% de la production a été réellement conduite sans recherche de spéculation durant les premières années jusqu’à explosion de cette bulle.
Il y aura peu de changement durant la production. Les 50 premières unités produites auront les vitres coulissantes qui sont remplacées par des vitres descendantes avec une manivelle (pas de système électrique).
De même, ces premiers exemplaires produits étaient dotés de 5 crevées verticales sur les ailes arrière qui passeront à 4 seulement.

La production initiale a été de 400 exemplaires, prévue pour s’étaler sur une courte période. Bien que la F40 soit à sa sortie la voiture de série la plus chère et la plus rapide du marché européen, la demande est largement supérieure à l’offre. Elle est vendue officiellement 5 fois plus cher que la 288 GTO.
Au final, 1311 unités seront produites (numérotés de 76624 à 95317) alors qu’une succession est assurée avec la Ferrari F50 à partir de 1995. La F40 sera la dernière Ferrari de route à moteur turbo jusqu’à la sortie de la California T en 2014, 27 ans plus tard.
Tous les modèles étaient peints en rouge sortie d’usine sauf de très rares commandes spéciales et toutes en conduite à gauche sauf 7 exemplaires réservés au Sultan de Brunei.


La F40 aux USA :
L’homologation aux USA de la F40 est obtenue alors que la spéculation sur ce modèle est en plein essor. Les caractéristiques extrêmes ont été un frein à l’arrivée de la F40 de l’autre côté de l’atlantique.
Ferrari avait signé un contrat avec l’importateur américain stipulant que 22% de la production (tous modèles confondus) était réservé aux USA, ce qui permis une augmentation de la production une fois l’homologation obtenue car la F40 n’était pas prévue pour ce marché à l’origine.



Quelques différences apparaissent sur ces versions comme les renforts en caoutchouc sur les pare chocs, une protection sur le spoiler avant, la présence d’un 3ème feu stop, l’absence de feu arrière de brouillard, les feux latéraux de position et des sièges avec une forme légèrement différente.
La plus grosse différence est la présence d’une version catalysée du moteur mais la puissance reste inchangée à 478 ch. On dénombre 600 unités produites avec ces spécifications.
La F40 en compétition :
De 1989 à 1998, Michelotto Automobili a poussé à 690 ch et 367 km/h, 19 F40 (numérotés de 74045 à 99893) pour créer des versions LM (Le Mans) et LM IMSA qui ont été engagées aux 24h00 du Mans et en championnat IMSA GT en classe GTO.
Cela débute par 2 F40 LM produites à la demande du président de Ferrari France qui seront testées par Jean Alesi, pilote Ferrari en F1, sur le circuit de Laguna Seca. Ces premiers modèles sont entièrement l’œuvre de Ferrari, Michelotto prenant la suite.
La centrale électronique provient de la F1, les intercoolers sont plus grands, les échappements sont réalisés dans le même matériau que celui d’une F1, la boite de vitesse est à crabots. La rigidité du châssis a été augmenté de 65%, les voies ont été diminuées afin de caser des pneus plus larges et la garde au sol a été réduite.




Michelotto produit aussi 5 unités de F40 GTE (numérotés de 82404 à 90001) à partir de l’expérience acquise sur les F40 LM afin de courir en championnat BPR global GT series de 1994 à 1996. Le v8 passe à 3,5l pour une puissance de 660 ch associé à une boite de vitesse à 6 rapports et des disques de freins en carbone céramique.


En championnat GT d’Italie, une version F40 GT a aussi été proposée à 7 exemplaires avec 590 ch de 1992 à 1994.



On note aussi 8 exemplaires de F40 Competizione allant de 720 à 900 ch pour un poids de 1050 kg réservés à des clients privés à leur demande exclusive pour courir sur des épreuves d’endurance.

F40 hors-série :
En 1989, un exemplaire de F40 Valéo (châssis 79883) est produit pour le PDG de Fiat / Ferrari, Gianni Agnelli. Elle est équipée d’un embrayage électronique produit par Valéo qui débraye en 100 millisecondes lorsqu’on manipule le levier de vitesse. Ce système avait été développé pour les Lancia Delta Intégrale de Rallye. Le levier de vitesse porte les inscriptions GA (les initiales d’Agnelli) à la place de la grille du levier de vitesse.
Ce n’est pas la seule particularité de cette F40 puisqu’elle elle est aussi équipée d’une sellerie noire au lieu de rouge.

Ferrari a produit 8 prototypes de F40 (châssis 73015, 74045, 74047, 74049, 74327, 75034, 75052 et 76354) dont certains ont été vendus par la suite. Chacun de ces modèles possède ses propres spécificités et se reconnait à des rétroviseurs différents, à un capot moteur avec plus ou moins de crevées ou bien encore d’autres petits détails.
Châssis 75052 :
Ce prototype se reconnait à ses 5 fentes à l’arrière, ses vitres en plexi coulissantes, ses feux jaunes et surtout ses rétroviseurs installés sur les déflecteurs de porte et non sur les portes. Autre détail intéressant, le ciel de toit est matelassé.




Châssis 76354 :
Il s‘agit de la F40 qui a été exposée durant le salon de Genève 1988.
Châssis 73015 :
Il s’agit de la première véritable F40 présentée à Maranello en juillet 1987.
Châssis 74045 :
Après avoir servi de voiture de développement, ce prototype a été transformés en F40 LM puis en F40 GTE et a même été engagé au Mans en 1995 et 96.

Châssis 74047 :
Il s’agit de la F40 qui a été présentée au salon de Francfort 1987 et a ensuite été envoyée à Michelotto pour être transformé en F40 GT. Elle a été engagée en championnat GT italien de 1992 à 1994.

Châssis 74049 :
Ce modèle est équipé de panneaux de carrosserie plus fin et de bras de rétroviseurs plus longs ainsi que d’un moteur à mi-chemin entre celui d’une F40 normale et une F40 LM.

